La rentabilité financière est l'un des indicateurs financiers les plus importants pour l'analyse des performances d'une entreprise ou d'un projet. Dans cet article, nous vous montrons de quoi il s'agit et quelles sont ses composantes, et évoquons également le mode de calcul de la rentabilité financière.
Pour mieux comprendre ce qu'est la rentabilité financière, il convient de s'attarder un instant sur le terme rentabilité au sens large.
En effet, cette dernière est un ratio qui mesure le rapport entre les profits générés par une entreprise ou un projet et les fonds qui ont été mobilisés pour l'obtention de ce résultat. C'est un instrument qui permet aux analystes et aux experts de la finance d'évaluer la performance d'une entreprise. Il est souvent utile pour les décideurs et les apporteurs de capitaux.
La rentabilité est différente de la profitabilité. La profitabilité mesure la capacité d’une entreprise à générer du profit. La rentabilité va plus loin en mettant en perspective le profit généré et les capitaux qui ont été nécessaires pour générer ce profit.
Dans la pratique, on distingue deux types de rentabilités : la rentabilité économique et la rentabilité financière.
La rentabilité financière est un indicateur de rentabilité qui permet d’évaluer le rendement des capitaux propres investis.
Il se mesure grâce au ratio :
Rentabilité financière = Résultat net / Capitaux propres
Exemple : Supposons qu'une entreprise X dégage un résultat net de 30 000 euros au titre de l'année N. Cela fait suite à la mobilisation de 100 000 euros de capitaux propres par les associés. La rentabilité financière de cette société est de 0,3, soit un taux de 30 %.
Pour ce calcul, il faut bien utiliser le résultat net annuel, calculé sur 12 mois.
Dans la comptabilité anglo-saxonne, cet indicateur se nomme Return on Equity (ROE).
Hors du cadre d'une entreprise, la notion de rentabilité financière peut également s'appliquer à un projet. Dans ce cas de figure, elle mesure la capacité des ressources financières mobilisées par le porteur de projet ou l'investisseur à générer un profit. On parle aussi dans ce cas de retour sur investissement.
C'est un indicateur qui sert à la prise de décision dans différentes situations, et qui diffère donc de la rentabilité économique.
La rentabilité financière et la rentabilité économique sont deux indicateurs de rentabilité mais qui diffèrent dans ce qu’ils englobent.
La rentabilité économique mesure la différence entre le profit d’un actif économique et la valeur de cet actif économique. On ne prend pas en compte la structure financière du bien.
Alors que la rentabilité financière varie en fonction de la structure financière de la société.
Prenons un exemple simple, l’achat d’un bien immobilier.
Un bien immobilier est un actif économique qui a lui-même une valeur économique et un profit.
Prenons un bien immobilier d’une valeur de 100 000 euros avec un loyer annuel de 10 000 euros et un taux d’imposition de 25%.
La rentabilité économique est ainsi de :
10 000 (1 - 25%) / 100 000 = 7,5%
Prenons maintenant l’hypothèse que ce bien est financé avec une partie de dette. Cette dette est rémunérée à 5%.
Si le bien a été financé à 20% avec des capitaux propres et à 80% avec de la dette, alors la rentabilité financière est la suivante :
(Loyers - Charges de la dette) * (1 - 25%) / Capitaux propres
= (10 000 - 4000) * (1-25%) / 20 000 = 22,5%
On voit ici clairement que la structure financière a trois impacts sur la rentabilité :
De manière générale, dans une entreprise :
Il est indispensable de mesurer la rentabilité financière d’une entreprise, pour les acteurs suivants :
Que devient le bénéfice d'une entreprise ?À la fin de chaque exercice, l'entreprise dispose d'un résultat net (son bénéfice après charges et impôts) qu'elle peut utiliser de deux façons :
Pour l'actionnaire, ces deux options sont théoriquement équivalentes en termes de rendement :
Cette équivalence repose sur un principe simple : une entreprise ne garde ses bénéfices que si elle estime pouvoir les investir de manière plus rentable que ce que les actionnaires pourraient faire eux-mêmes. Ainsi, la croissance de l'entreprise se traduit par une augmentation de la valeur des actions, compensant l'absence de dividendes.
C’est l’un des principaux avantages de la rentabilité financière : elle permet de comparer deux entreprises entre elles, notamment grâce au taux de rentabilité . En effet, le résultat net en absolu ne dit pas grand chose. Deux entreprises avec le même résultat net peuvent avoir dépensé des montants différents pour avoir ce résultat. La rentabilité financière permet de mesurer ce rapport.
En comparant la rentabilité attendue des différents projets, l'entreprise peut prioriser ses investissements. Cela aide également à déterminer le mode de financement optimal entre fonds propres et endettement, en fonction du coût du capital et des rendements espérés.
Cette comparaison sectorielle permet d'identifier les meilleures pratiques et les axes d'amélioration. Une rentabilité inférieure à la moyenne du secteur peut révéler des problèmes de gestion ou des inefficacités opérationnelles à corriger.
L'analyse de la rentabilité financière permet d'ajuster le ratio dettes/fonds propres pour maximiser le rendement tout en maintenant un risque acceptable. Elle guide aussi la politique de distribution des dividendes en fonction des besoins de réinvestissement.
La rentabilité financière est un KPI central dans les tableaux de bord de direction. Elle synthétise l'efficacité globale de la gestion et permet un suivi régulier de la performance.
En analysant les tendances de rentabilité, on peut évaluer si l'entreprise crée durablement de la valeur. Cela permet d'anticiper les ajustements nécessaires pour maintenir une performance satisfaisante.
La rentabilité financière est un indicateur compris par tous les acteurs. Elle facilite la communication avec les banquiers, investisseurs et autres partenaires sur la performance de l'entreprise.
L'interprétation de la rentabilité financière d'une entreprise est très simple. En effet, la valeur de cet indicateur correspond à ce que génère comme profit chaque euro investi dans l'entreprise ou dans le projet concerné.
Par exemple, si le résultat net est de 100 000 euros et que la valeur des capitaux propres est de 10 000 000 euros, alors la rentabilité financière est de 10 000 000 / 100 000 = 1%.
Autrement dit, pour chaque euro investi, l’entreprise génère 1 centimes de profit net.
La rentabilité financière présente une grosse limite, c’est qu’elle ne prend pas en compte le risque.
Quand une entreprise s’endette, elle augmente potentiellement sa rentabilité financière. La différence entre la rentabilité financière et la rentabilité économique s’appelle l’effet de levier.
Rentabilité financière = rentabilité économique + effet de levier
L’effet de levier, permis par la dette, augmente la rentabilité si et seulement si la rentabilité économique est plus élevée que le taux d’intérêt.
Ceci étant dit, la rentabilité financière est plus élevée, mais le niveau de risque global de l’entreprise global de l’entreprise augmente.
A tel point que Modigliani et Miller, deux économistes renommés, ont montré que la valorisation d’une entreprise n’était pas dépendante de sa structure financière. Autrement dit, quand une entreprise s’endette, elle peut certe augmenter sa rentabilité financière, mais l’augmentation du risque compense cette augmentation de la rentabilité et la valorisation de l’entreprise est constante. Source : Modigliani, F. et Miller, M.H. (1958), « The Cost of Capital, Corporation Finance and the Theory of Investment », The American Economic Review, Vol. 48, No. 3, pp. 261–297.)
Cette théorie relativise beaucoup la notion de rentabilité financière. Sélectionner une entreprise plus ou moins rentable financièrement ne dépendrait que de l'appétence au risque de l’investisseur. La véritable rentabilité permettant de comparer les entreprises entre elles serait ainsi la rentabilité économique.
La rentabilité financière d'une entreprise peut également être négative dans certaines situations. Cela signifie simplement que l'entreprise n'est pas en mesure de couvrir ses charges avec le revenu que génère son activité.
Les jeunes entreprises sont souvent confrontées à cette situation. De même, certaines grandes entreprises implantées ont aussi parfois un résultat net négatif. Pourtant, la valeur de leur capitaux propres n’est pas de zéro. Cela signifie concrètement que les actionnaires et investisseurs ont espoir dans la capacité de l’entreprise à générer du profit dans les prochaines années.
La rentabilité financière renseigne donc sur la capacité d'une société à générer du profit à partir des sommes investies par ses actionnaires. Plus il est élevé, mieux c'est pour l'entreprise.
Pour que l’analyse de la rentabilité financière soit pertinente, il faut la comparer à des éléments comparables :
Une bonne rentabilité financière varie significativement selon les secteurs d'activité. Voici quelques données concrètes (sources : INSEE et études sectorielles 2022-2023) :Secteurs avec des ROE typiquement élevés :
Secteurs avec des ROE moyens :
Secteurs avec des ROE plus faibles :
En France, selon la Banque de France (2022) :
Points de repère généraux :
Ces chiffres doivent être analysés en tenant compte du contexte économique, du niveau de risque et du cycle de vie de l'entreprise.
La rentabilité financière (ROE) et le coût du capital (Cost of Equity) sont deux concepts financiers distincts mais étroitement liés :
Le ROE est un indicateur de performance réelle qui mesure ce que l'entreprise a effectivement généré comme rendement pour ses actionnaires.
Le coût du capital représente le rendement minimum exigé par les investisseurs pour accepter d'investir dans l'entreprise. C'est un indicateur tourné vers le futur, qui reflète le niveau de risque perçu de l'entreprise.Relation entre les deux concepts :
Exemple concret : Une entreprise avec un ROE de 15% et un coût du capital de 10% crée 5% de valeur supplémentaire pour ses actionnaires. À l'inverse, si son coût du capital était de 20%, elle détruirait 5% de valeur.
Cette comparaison est cruciale pour :
Un ROE supérieur au coût du capital n'est pas qu'un objectif financier, c'est une condition de survie à long terme pour l'entreprise.
La rentabilité financière peut être améliorée en optimisant trois leviers : augmenter les marges (politique de prix, réduction des coûts), accélérer la rotation des actifs (gestion des stocks, recouvrement), et optimiser la structure financière (effet de levier maîtrisé).
Le ROE (Return on Equity) mesure la rentabilité des fonds propres, tandis que le ROA (Return on Assets) mesure la rentabilité de l'ensemble des actifs. Le ROA exclut l'effet de levier financier et donne une vision plus pure de la performance opérationnelle.
On utilise les projections financières du business plan : résultat net prévisionnel divisé par les capitaux propres prévisionnels. Il est conseillé de faire plusieurs scénarios (pessimiste, réaliste, optimiste) et de comparer avec les moyennes du secteur.
L'inflation peut augmenter artificiellement la rentabilité financière car elle gonfle le résultat nominal. Cependant, elle peut aussi augmenter les coûts et réduire les marges. Il est important d'analyser la rentabilité réelle (hors inflation).
Pour les startups, la rentabilité financière traditionnelle est souvent peu pertinente car elles sont en phase d'investissement. Il faut plutôt regarder la trajectoire de croissance, le taux de combustion de trésorerie et les perspectives de rentabilité future.
Le taux de profit (résultat/chiffre d'affaires) mesure la marge bénéficiaire, tandis que la rentabilité financière (résultat/capitaux propres) mesure l'efficacité de l'utilisation des fonds propres. Deux entreprises peuvent avoir le même taux de profit mais des rentabilités financières très différentes.
Les grandes entreprises ont généralement des rentabilités financières plus stables mais plus faibles que les PME. Les PME peuvent avoir des rentabilités plus élevées mais plus volatiles, en raison d'une plus grande flexibilité et de marchés de niche.
Les secteurs technologiques (25-30%), le luxe (20-25%) et les services numériques (15-20%) maintiennent les meilleures rentabilités. Les secteurs traditionnels comme l'industrie ou le commerce restent autour de 8-12%.
Une baisse peut signaler plusieurs problèmes : pression sur les marges, inefficacité opérationnelle, sursinvestissement ou problèmes de marché. L'analyse doit être complétée par d'autres indicateurs (marge, rotation des actifs, endettement) pour identifier les causes précises.